Petit état des lieux
La société française a considérablement évolué au cours des dernières années. Le dire semble être une évidence, mais est-ce aussi évident pour tout le monde ?
A priori, oui. Du moins si l’on prend en compte les diagnostics émis par les leaders politiques au cours des dernières années. A commencer par celui, brillant, de Jacques Chirac sur la fracture sociale, complété par celui de Jean-Pierre Raffarin sur la “France d’en bas“.
Mais à l’arrivée, à quels résultats ces diagnostics ont-ils aboutis ?
Selon leur engagement et leurs convictions, les uns vous démontreront, chiffres à l’appui, que de vraies mesures ont été prises, que les choses sont en voie d’amélioration. Les autres, avec la même sincérité, vous prouveront que, non seulement rien n’a été fait, mais que les inégalités se sont creusées.
Qui a tort ? Qui à raison ?
Match nul, balle au centre : les deux camps ont raison. La vérité est équitablement partagée, tout comme la mauvaise foi !
Et la grande phrase a été lâchée : les deux camps !
Oh bien sûr, cette bipolarisation de la vie politique n’est pas spécifiquement française, républicains et démocrates aux Etats-Unis, travaillistes et conservateurs en Grande-Bretagne… les exemples ne manquent pas.
Non, notre spécificité est la “bipolarisation fluctuante“ : le Français choisit son camp, défend vigoureusement son “engagement“, mais n’hésitera pas à se renier avec la même sincérité quelques mois plus tard !
Et cela, je l’ai constaté à maintes reprises, il suffit de prendre les résultats d’élections locales dans des quartiers dits populaires. La comparaison des chiffres des tours permet alors de vérifier le report des voix de l’extrême droite sur un candidat socialiste, lequel n’a rien demandé et est même, souvent, plutôt embarrassé par ce vote.
On tente de nous expliquer alors qu’il s’agissait là de votes de protestation, que les électeurs ont voulu donner un avertissement au monde politique…
Mais qu’est-ce que ça veut dire, un vote de protestation ?
Soyons clair : lors d’une élection (hors référendum, qui est un cas particulier) chaque candidat présente un programme, le choix devrait donc porter sur ce programme et rien d’autre.
Comment se fait-il que lors d’élections régionales, les Français estiment-ils pouvoir infléchir la politique nationale ?
Comment, lors d’un scrutin européen, est-ce le gouvernement français qui devient la cible des critiques ?
On peut comprendre l’exaspération de ceux qui sont en difficulté, qui ont envie que les choses changent rapidement, mais là encore, paradoxe ! Ce sont ceux qui réclament le plus des changements rapides qui s’opposent aux évolutions nécessaires.
Et nous en revenons toujours au même point : la communication. Dire qu’il faut réformer, exposer le problème, c’est bien. Mais a-t-on suffisamment expliquer les récentes réformes ? Certes, il y a eu des débats, des réunions… Un effort a visiblement été fait, mais une fois encore, totalement à côté de la plaque !
Prenons le cas de la réforme scolaire. François Fillon avait parfaitement compris le besoin d’implication des Français, il avait souhaité un vaste débat. Ce débat a eu lieu. Le résultat : des manifestations, le retrait d’une partie du projet, le désaveu d’un ministre qui avait sincèrement et honnêtement tenté de jouer le jeu de la concertation. Rappelez-vous les unes des journaux, n’avait-on pas l’impression que toute la jeunesse de France était dans la rue ?
Et pourtant la réalité était toute autre : 10 % d’étudiants dans la rue !
Une nouvelle fois, une minorité agissante imposait sa manière de voir les choses. Or moi, j’ai toujours appris qu’en démocratie, c’est la majorité qui décidait !
Et je ne reviendrais pas sur la grève des intermittents du spectacle, où l’on a vu à la pointe de la contestation au syndicat défendre un statut qu’il avait violemment combattu (et refusé de signer) quelques années au paravent !
Alors je persiste et je signe :nous n’avons pas su expliquer les véritables enjeux de nos réformes. Et comme je l’ai déjà dit à maintes reprises, ce ne sont pas la qualité et la compétence des hommes chargés de la communication du gouvernement ou des partis qui sont en cause, mais bien leur éloignement de ce que l’on a appelé la “France d’en bas“.
Et même cela, ce n’est pas un reproche : il est difficile de rester totalement connecté aux réalités du terrain quand on passe 10 ou 12 heures dans un bureau, entouré de gens qui sont convaincus, et de toute bonne foi, avoir pris les bonnes décisions. Les choses semblent tellement évidentes qu’il est difficile d’admettre qu’elles ne le soient pas pour tout le monde.
Aujourd’hui, les Français attendent des résultats immédiats, or nous savons tous que gouverner c’est prévoir, donc agir à moyen et long terme. Malheureusement une action à long terme et des résultats rapides sont deux choses incompatibles.
Le Français d’aujourd’hui me fait irrésistiblement penser à l’Antigone de Jean Anouilh : “Moi, je veux tout, tout de suite, – et que ce soit entier – ou alors je refuse ! Je ne veux pas être modeste, moi, et me contenter d'un petit morceau si j'ai été bien sage. Je veux être sûre de tout aujourd'hui...“
(à suivre)
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Ne laissons pas s'éteindre la flamme !
Il n’aura échappé à personne que je suis membre d’un parti politique. Je suis militant. Pas sympathisant, pas simple détenteur d’une carte : militant de terrain !
Au sein ce parti, j’exprime librement mon opinion, que cela plaise ou non. Le jour où je ne serais plus écouté (sinon entendu) ou si je devais être en désaccord profond avec les prises de positions officielles, je rendrais ma carte !
Pourquoi cette entrée en matière ?
Parce que j’estime que le débat sur la constitution européenne, même faussé par la méconnaissance flagrante des Français pour les institutions européennes, les mensonges éhontés de certains pourfendeurs du “oui“ et l’intrusion dans la campagne de problèmes franco-français, a montré l’intérêt de nos concitoyens pour la chose européenne.
L’Europe est présente dans notre vie quotidienne, la majorité de nos lois sont d’origine européenne. En 2007 nous allons élire nos députés et notre président : exigeons qu’ils prennent des positions claires vis-à-vis de l’Europe, que les programmes intègrent une part de politique européenne. Et n’hésitons pas à boycotter les candidats qui ne rempliraient pas cette condition !
Qu’un homme politique de premier plan puisse affirmer que l’Europe est une chose trop compliquée pour qu’on en parle et que de toute façon cela n’intéresse pas les Français est proprement inadmissible !
Je sais bien que pour beaucoup, l’Europe est quelque chose d’abstrait, mais pour nous, frontaliers, elle est une réalité que nous vivons au quotidien.
J’irais même plus loin dans mon raisonnement : l’Europe a sa place dans nos politiques locales. Au niveau régional, il est possible de développer des collaborations entre régions européennes. Au plan municipal, il est important d’intensifier les jumelages afin de permettre aux enfants français de mieux connaître les enfants des autres pays de l’Union.
Alors, ne nous laissons pas gagner par ce que j’ai appelé un jour le syndrome de Clovis qui consiste à aduler un jour ce qu’on a honni la veille et réciproquement : l’intérêt pour l’Europe ne doit pas retomber ! A nous d’entretenir la flamme. -
Nos hommes politiques ne savent pas communiquer (3)
Constat : le Politique ne sait pas communiquer !
Formule lapidaire, abrupte peut-être, exagérée certainement, mais vérifiée le plus souvent.
Ou plus exactement : le Politique ne sait pas communiquer efficacement.
Ce postulat n’engage que moi, mais en vingt ans d’activités politiques, parfois simple militant, parfois appelé à des responsabilités locales, j’ai pu en mesurer la véracité.
Oh, je ne prétends pas détenir la vérité, mais en dehors de mes activités politiques, j’ai un métier (quand même) : je suis conseiller en communication.
Cela me donne-t-il le droit de juger ? Certainement pas !
De conseiller ? Peut-être…
De donner mon avis ? Sûrement !
Si le Français, qui souhaite avoir une information, est obligé de la chercher (et après un périple digne du plus ardu des parcours du combattant) c’est bien la preuve du mauvaise communication, non d’un déficit de communication. Car il est possible de trouver toutes les informations dont on peut avoir besoin. Elles existent. Mais encore faut-il savoir où les chercher !
Le principe de base qui voudrait que l’on donne la bonne information à la bonne personne n’est pas appliqué. C’est en cela que j’affirme que le Politique ne sait pas communiquer.
Entendons-nous bien, tout n’est pas de la faute du Politique. Comme je l’ai dit plus haut, quand on veut obtenir une information il est toujours possible de la trouver, et dans ce sens, le citoyen a sa part de responsabilité. La démocratie se mérite ! Elle devrait être un échange permanent entre le citoyen de base et ses élus.
Mais soyons réalistes, cet effort peu de Français sont prêts à l’accomplir.
Essayons de comprendre pourquoi... (à suivre)