La scène se passe à la Fnac. Le personnage principal, genre mémère qui vient en ville une fois par an et qui se sent obligée de faire partager ses avis pertinents à tous ceux qui peuvent l’entendre. Et comme l’une des caractéristiques de ce genre de personnage est d’avoir une voix forte (et souvent désagréable), personne n’y échappe !
Pour situer le problème, depuis deux ans, la ville est en chantier :
construction d’un tramway. Cela a, bien entendu, occasionné des gènes, mais
rien de dramatique, suffit d’être patient et de savoir s’adapter. Ici, quand on
parle d’embouteillage et d’encombrements, il faut entendre un ralentissement de
5 minutes maximum. De quoi faire sourire les automobilistes des grandes villes
! Mais quand on sort de son patelin une fois toutes les années bissextiles et
que l’on s’imagine pour s’arrêter devant la porte d’un magasin, la déconvenue
est grande !
Revenons à mémère : après s’être assuré que l’auditoire potentiel était assez
important, elle lance à (très) haute te intelligible voix :“Quel con, ce maire
! Qu’est-ce qu’il avait besoin de faire chier tout le monde avec sa connerie de
tram.“ Vous apprécierez au passage la finesse du langage…
Pourquoi s’est-elle soudain figée, la bouche grand ouverte en me fixant
intensément ? Est-ce le regard noir que je lui ai lancé ou le “connasse“ qui a
glissé malgré moi entre mes lèvres ?
J’ai été un farouche adversaire de ce projet de tram, mais celui-ci ayant été
l’un des enjeux des dernières élections municipales et donc, de fait, approuvé
par les électeurs, le jeu démocratique veut que l’on se plie à l’avis de la
majorité. On ne peut quand même pas reprocher à un homme politique d’appliquer
son programme. Et ce tramway en faisait partie !
Cette réaction est symptomatique de ce que l’on peut observer dans le
comportement actuel des Français : un total désintérêt au moment où ils peuvent
avoir une action sur les décisions futures et une propension certaine à
critiquer après coup !
Paradoxalement, alors qu’on nous répète inlassablement que les Français se
désintéresse de la politique, les adhésions spontanées à des partis politiques
sont extrêmement nombreuses, ce qui est étonnant hors période électorale. Pour
ne prendre que le cas d’un parti que je connais bien et sur ma seule commune,
le nombre d’adhérents a progressé de 20% en 3 mois !
Dans un peu moins de 2 ans, nous allons être face à des échéances importantes :
c’est dès à présent qu’il faut être sur le terrain, écouter, dialoguer,
convaincre… Il est temps de faire comprendre à nos concitoyens que les votes de
protestations sont stériles, les exemples récents en sont une preuve éclatante.
La tâche s’annonce rude, la mémoire est sélective !
Et quand la connerie humaine tient lieu de jugement, il faut s’armer de
patience et résister à l’envie grandissante de baisser les bras.